La consommation d’énergie finale[0] par source d’énergie en France est encore largement dominée par le pétrole (40%) suivi par l’électricité et le gaz, respectivement à 25% et 21%. Cette vision globale cache des spécificités propres à chaque secteur, notamment dictées par l’importance des usages spécifiques[1].
Si dans les transports et l’industrie ces usages spécifiques freinent la concurrence entre électricité et gaz, la situation est tout autre dans le secteur du résidentiel tertiaire où les deux énergies sont plus facilement substituables. De plus, ce secteur est le plus énergivore de France et le seul où la consommation d’énergie se maintient.
Dans un contexte de libéralisation des marchés, tous les ingrédients d’un match à couteaux tirés entre gaz et électricité pour conquérir les ménages et les entreprises de service sont réunis.
Atlante vous propose dans ce repère quelques chiffres pour illustrer cette situation spécifique.
Consommation finale d’énergie par secteur en France
Dans les transports, le pétrole est roi
L’utilisation du pétrole est largement majoritaire dans le transport qu’il soit aérien, maritime, automobile ou routier. L’électricité elle, est principalement utilisée pour le transport ferroviaire, les véhicules électriques restant anecdotiques.
Répartition par source de la consommation finale d’énergie des transports
Dans l’industrie, une évolution du mix dictée par l’évolution de l’équilibre entre filières
La consommation énergétique du secteur industriel est en baisse quasiment constante depuis les années 70. En effet, la production industrielle française s’est effacée au profit des services, et l’efficacité énergétique des équipements s’est améliorée.
On observe (cf. graphique ci-dessous) que les sources d’énergies utilisées varient fortement selon la filière industrielle concernée (usages spécifiques importants). Ceci s’explique par des usages spécifiques selon les secteurs d’activités, par exemple :
- un produit du processus de production de la pâte à papier est la liqueur noire. Celle-ci est entièrement recyclée pour être utilisée par l’industrie du papier en tant que matière première et source de production d’électricité ;
- le gaz est très utilisé par l’industrie chimique en tant que source d’énergie car il sert aussi de matière première ;
- l’électricité est utilisée dans de multiple filières industrielles afin d’alimenter les machines.
Il en résulte que la consommation de l’industrie dépend de l’évolution de l’activité des différentes filières industrielles. En 2012, les secteurs les plus énergivores sont encore :
- l’industrie du papier et carton ;
- l’industrie agro-alimentaire ;
- l’industrie du caoutchouc, plastique, et autres produits minéraux non métalliques ;
- la métallurgie ;
- l’industrie chimique.
Consommation d’énergie des filières industrielles les plus énergivores
L’enjeu de la lutte entre gaz et électricité : le secteur résidentiel-tertiaire
C’est dans le résidentiel et le tertiaire que les équilibres entre les énergies évoluent le plus, avec un leadership des produits pétroliers jusqu’aux années 90 durant lesquelles le gaz devient l’énergie la plus consommée avant que l’électricité, à partir des années 2000 ne vire en tête.
Mix énergétique du secteur résidentiel-tertiaire
L’énergie dans ce secteur est consommée pour quatre usages principaux :
- le chauffage ;
- l’électricité spécifique ;
- l’eau chaude ;
- la cuisson.
Une des particularités de ce secteur est que pour chacun des postes d’utilisation, mis à part l’électricité spécifique, plusieurs sources d’énergies sont possibles et plus facilement substituables que dans l’industrie et le transport. Par exemple, pour le chauffage, qui représente 47%[2] de la consommation d’énergie du secteur tertiaire et 67%[2] de la consommation des ménages en 2013, différentes options sont disponibles : chaudière à gaz, pompe à chaleur, poêle à bois, etc. Il en va de même pour la cuisson et l’eau chaude qui concernent surtout les ménages. Le gaz et l’électricité sont donc en concurrence direct sur ces trois postes, qui totalisent la majorité de la consommation du secteur.
Mix énergétique du chauffage résidentiel
Mix énergétique du chauffage tertiaire
On constate que le fuel est en net recul ces dernières années au profit du gaz et de l’électricité, qui enregistre la plus forte hausse. On note aussi une baisse de la part de consommation du chauffage. Plusieurs faits peuvent être à l’origine des ces changements, notamment :
- le fuel a connu une forte augmentation de ses prix jusque récemment et présente des inconvénients structurels (stockage, odeur, bruit…) ;
- les pompes à chaleur ont connu un fort développement ces dernières années ;
- de manière plus générale, l’efficacité énergétique des installations et des bâtiments a été améliorée, notamment portée par des incitations fiscales et de nouvelles normes.
Ces évolutions sont aussi le reflet d’une modernisation de l’offre du gaz et de l’électricité, et des politiques commerciales pro-actives des énergéticiens et des installateurs d’équipements (pompe à chaleur, panneaux solaires, chauffage bois…).
Or, l’essentiel des politiques commerciales des acteurs se concentraient jusqu’ici sur le chauffage, qui déterminait ensuite le plus souvent le choix de l’énergie pour l’eau chaude et la cuisson. Et cette situation risque d’être progressivement remise en cause dans les bâtiments neufs avec la généralisation des bâtiments à énergie positive attendus avec la Réglementation Thermique 2020. Dans ces bâtiments qui produisent plus d’énergie qu’ils n’en consomment pour fonctionner, la consommation nette pour le chauffage est fortement réduite grâce à une isolation performante et la consommation d’énergies « gratuites » (soleil, air) produite dans l’environnement immédiat du bâtiment.
La cuisson et l’eau chaude risquent donc mécaniquement de reprendre la part belle dans le match entre gaz et électricité.
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[0] L’énergie finale ou disponible est l’énergie livrée au consommateur pour sa consommation finale (essence à la pompe, électricité au foyer,…), par opposition à l’énergie primaire qui regroupe l’ensemble des produits énergétiques non transformés, exploités directement ou importés. Ce sont principalement le pétrole brut, les schistes bitumineux, le gaz naturel, les combustibles minéraux solides, la biomasse, le rayonnement solaire, l’énergie hydraulique, l’énergie du vent, la géothermie et l’énergie tirée de la fission de l’uranium.
[1] Des usages spécifiques sont des besoins qui ne peuvent pas ou plus difficilement être satisfaits à partir d’une autre source d’énergie.
[2] Chiffres corrigés des aléas climatiques.