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Il ne reste que quelques semaines avant le premier tour des présidentielles, et pourtant, les enjeux énergétiques ne sont abordés qu’épisodiquement, en fonction d’évènements médiatiques comme Photowatt ou le record des prix à la pompe. Afin d’y voir un plus clair sur les différents programmes, Atlante & Cie vous propose un tour d’horizon des propositions des principaux candidats sur le secteur énergétique. Après les articles à propos de Marine Le Pen et François Bayrou, voici l’analyse des propositions de Jean-Luc Mélenchon.

Jean-Luc Mélenchon veut une maîtrise publique, sociale et démocratique des enjeux énergétiques, seule garante, selon lui, de l’indépendance et de l’expertise nécessaires. Il propose donc, comme François Bayrou et François Hollande un débat sur l’avenir énergétique français.

Les principaux autres candidats ne remettent pas en cause l’organisation actuelle du marché, qui laisse pourtant ouverte de nombreuses questions. Jean-Luc Mélenchon, lui, avance des propositions fortes : il remet en question la déréglementation et la libéralisation des marchés de l’énergie, propose la création d’un “pôle 100% public de l’énergie” et ré-interroge le modèle économique de l’ensemble du secteur, à l’image du reste de son programme.

Ses propositions s’inscrivent dans le cadre d’une “planification écologique”  qui redéfinirait les “modes de production, de consommation et d’échange en fonction de l’intérêt général” et préciserait “les orientations et les investissements publics nécessaires pour enclencher une transition écologique et promouvoir un développement humain durable créateur d’emplois et facteur d’égalité sociale” .

Evolution du mix énergétique

Le candidat du Front de gauche, à la tête d’une coalition aux avis hétéroclites sur la place du nucléaire civil, propose de lancer un débat public sur la politique énergétique en France qui se conclurait par un référendum. Il permettrait de se prononcer sur les choix énergétiques et plus précisément sur l’avenir du nucléaire et les solutions de “remplacement des énergies fossiles“. Ce débat, présenté dans son programme comme concernant la politique énergétique dans son ensemble, est parfois résumé par le candidat lui-même par l’expression “référendum sur la sortie du nucléaire“. Il paraît en effet difficile de définir une politique énergétique (organisation du marché, mix énergétique, objectifs de maîtrise de l’énergie…) par la voie binaire du référendum.

Jean-Luc Melanchon, en cas de vote pour la fin du recours à l’énergie nucléaire, propose d’adopter le scénario très ambitieux défendu par l’association Négawatt, avec une fermeture en 2033 de la dernière centrale et un “basculement presque total vers les énergies renouvelables” en 2050.

Sans attendre les résultats de ce débat, M. Mélenchon propose la “réinternalisation de toutes les opérations de maintenance et de sûreté nucléaire” en réponse aux critiques sur le recours élevé d’EDF à la sous-traitance pour l’entretien de son parc de centrales.

Pour le développement des énergies renouvelables, indispensables en cas de rejet de l’énergie nucléaire par référendum, le candidat propose de mettre en place “un plan de financement pour la diversification des sources d’énergie” avec un accent sur le développement de la géothermie, -dont “[il] est fan“, et de “l’énergie de la mer“. La contribution de ces deux sources à la production totale d’énergie est encore très marginale dans le monde (0,3% de la puissance électrique installée et 1 % de la production de chaleur pour la géothermie) mais elles ont un fort potentiel de développement, comme l’a souligné le Grenelle de l’environnement. Le 19 mars 2012, le ministère de l’énergie a d’ailleurs confirmé son intérêt pour l’énergie hydrolienne en annonçant le lancement d’un appel d’offres visant à développer cette technologie.

Par contre, Jean-Luc Mélenchon se montre plus sceptique sur l’énergie éolienne : “Je trouve ça laid, les éoliennes. Et la beauté a son importance. Un beau paysage, je crois que cela a une fonction humaine” (Interview de TerraEco). Position étonnante, lorsque l’on sait que le scénario Négawatt défendu par le candidat prévoit, pour faire face à la fermeture des centrales nucléaires et à la baisse des recours aux énergies carbonnées, “une multiplication par 3,5 de la puissance installée [dans l’éolien terrestre] d’ici 2020 puis encore par 2 avant 2050 avec un total de 17 400 machines installées contre 4 000 fin 2011“.

Le candidat propose également, sans préciser de montants, “d’engager un effort massif en faveur de la recherche, du développement des filières technologiques et industrielles, des investissements, de la formation pour le développement des énergies renouvelables et leur utilisation publique ainsi que pour le traitement des déchets issus de la filière nucléaire“.

Maitrise de la demande

Suivant notamment les recommandations de Négawatt, Jean-Luc Mélenchon met au coeur de sa politique énergétique la promotion de la sobriété et de l’efficacité énergétique : “moins de consommation pour des usages identiques“. Il veut notamment, combattre “les gaspillages ostentatoires des très riches” et mettre en place un plan national de remise aux normes énergétiques des logements et de l’ensemble des bâtiments publics qui s’appuierait sur un dispositif d’allocation financière sur condition de ressources pour aider au financement par les particuliers de la rénovation thermique de leurs logements.

Accès à l’énergie

Jean-Luc Mélenchon milite pour la mise en place d’une “une tarification sociale et progressive qui assure l’accès à l’énergie de toutes et de tous” avec une gratuité des premiers kW/h, puis une tarification encourageant aux économies d’énergie, parallèlement à une suppression des coupures d’électricité “qui se multiplient aux dépens des plus pauvres“. Le candidat défend une fixation des coûts de l’énergie dans des “conditions socialement justes et écologiquement responsables” : “je pense qu’il y a des biens auxquels il est d’intérêt général que tout le monde puisse accéder gratuitement“.

Concernant les records sur le prix à la pompe, le candidat du Front de gauche entend résoudre le problème par une réorganisation du secteur de l’énergie avec un contrôle accru de l’Etat.

Organisation du marché

La décision la plus spectaculaire du candidat dans ce domaine est la création d’un “pôle 100 % public de l’énergie comprenant EDF, GDF, Areva et Total renationalisé avec tous les salariés sous le même statut“. Cependant, aucune précision sur les modalités de cette mesure n’a été donnée par le candidat  : de quel type de nationalisation s’agirait-il (rachat contraint d’actions ou confiscation sans contrepartie financière) ? De quels statuts dépendraient les employés de ce nouveau pôle  ? Probablement au statut des IEG, le statut historique des agents de l’Industrie Electrique et Gazière.

Parallèlement à la création de ce pôle, les politiques de déréglementation et de libéralisation du secteur de l’énergie seraient abrogées, en particulier la loi NOME visant à organiser la concurrence sur le marché de l’électricité. Mais le candidat ne précise pas quelle serait sa stratégie de négociation avec les instances européennes, qui ont poussé les gouvernements successifs à la libéralisation de ce secteur.