Quels sont les nouveaux rôles des collectivités territoriales relatifs à la politique énergétique ?

Plusieurs évolutions législatives intervenues ces dernières années en matière de décentralisation des politiques énergétiques ont donné aux régions, départements et métropoles le rôle de chef de file en matière d’énergie. Ce rôle confère aux territoires la responsabilité d’impulsion et d’organisation des modalités d’action mais non celui de décision.

Suite aux lois MAPTAM et LTCEV, la gouvernance énergétique entre mailles nationale et territoriale est transformée, les plans énergétiques des régions et métropoles sont enrichis et les moyens d’actions des collectivités territoriales sont clarifiés et renforcés. Le système énergétique présente donc l’apparence d’une forte décentralisation de sa gouvernance.

En plus de ces nouvelles responsabilités en matière d’énergie, les collectivités territoriales ont des rôles majeurs en matière de transport, déchets, urbanisme et logement. Ces trois domaines consomment près de deux tiers de l’énergie finale et se répercutent directement sur les émissions de gaz à effet de serre avec :

  • 15% des émissions qui relèvent directement des collectivités locales ;
  • 50% en intégrant leur rôle de planification et d’aménagement ;
  • 70% avec les modifications de comportement des citoyens.

Les collectivités ont donc bien un rôle majeur d’impulsion d’initiatives locales afin d’organiser sur leur territoire les actions pour l’atteinte des objectifs nationaux en matière de transition énergétique.

Qu’est-ce qu’un système énergétique décentralisé ?

Un système énergétique décentralisé correspond à un ensemble intégré de moyens de production locaux, de gestion du réseau, de stockage, de rénovation thermique des bâtiments et de mobilité, organisé sur un territoire rapprochant producteurs et consommateurs.

Les mailles de ces systèmes peuvent varier : région, agglomération, ville, quartier, bâtiment… Une place prépondérante est généralement accordée aux acteurs locaux sur l’ensemble de la chaine de valeur : production, distribution, fourniture, gestion de la demande, services. Un parallèle peut être fait avec le circuit court dans le système agroalimentaire.

Si certains territoires ont déjà lancé de tels projets (Flexigrid en région Provence Alpes Côte d’Azur, SMILE en Bretagne…), ces projets restent des initiatives tirées par certaines personnalités engagées et ne se généralisent pas à ce stade à l’ensemble des territoires français.

Quels sont les freins actuels et leviers pour développer les projets énergétiques par les territoires ?

Les réformes citées précédemment se sont accompagnées de dispositions financières pour encourager les collectivités territoriales à lancer de tels projets : enveloppe de l’Etat, prêt de la Caisse des Dépôts, mis à disposition de dispositifs de financement innovants (comme le financement participatif dont nous parlions dans un article du 29/11/2016), etc.

Certains freins règlementaires pour l’émergence des systèmes énergétiques décentralisés ont aussi été levés ces derniers mois notamment grâce à l’ordonnance sur l’autoconsommation publiée à l’été 2016 dont nous parlions dans un article du 23/12/2016.

Malgré cette impulsion, les moyens financiers et humains restent limités, un grand nombre de missions reste centralisé et les collectivités n’ont pas les moyens humains et les compétences techniques sur le secteur. Une transformation à grande échelle du système énergétique nécessite par exemple une régulation incitative pour stimuler les acteurs et tester de nouvelles solutions. En comparaison des grandes entreprises du secteur, des contrôles devraient aussi être mis en place quant à la bonne utilisation des ressources allouées aux territoires.

Une politique de l’énergie reste en effet nécessaire au niveau national :

  • La multiplication d’unités de production décentralisées souvent intermittentes rend nécessaire un renforcement des réseaux de transport et de distribution ;
  • Une cohérence globale en matière de politique énergétique doit perdurer afin de garder un contrôle de l’énergie injectée sur les réseaux et d’éviter des décisions non coordonnées entre deux régions ;
  • Le service public permet de garantir la péréquation tarifaire et l’obligation de desserte sur tout le territoire français.

La décentralisation des politiques énergétiques constitue cependant une étape importante pour le développement de projets énergétiques décentralisés, en donnant aux territoires les outils permettant de lancer de tels projets. Cette décentralisation du rôle de chef de file rend ainsi possible une démultiplication du cadre national par des initiatives plus locales, qui va accélérer les transformations du système énergétique français.

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